Le conducteur est-il toujours celui qui est volant ?
Ce que dit la loi
L’article 1 de la loi BADINTER pose le principe de l’indemnisation des victimes d’accident de la circulation dans lequel est impliqué un véhicule terrestre à moteur ainsi que ses remorques ou semi-remorques, à l’exception des chemins de fer et des tramways circulant sur des voies qui leur sont propres.
La loi opère une distinction entre, d’une part, la victime conductrice et la victime non-conductrice, d’autre part, les dommages aux biens et les dommages corporels.
Le conducteur fautif peut se voir opposer sa propre faute, qui est de nature à limiter ou à exclure son droit à indemnisation pour les dommages corporels qu’il a subis.
En revanche, la victime non-conductrice ne peut se voir opposer sa propre faute à l’exception de la faute inexcusable lorsqu’elle a été la cause exclusive de l’accident.
Si la loi n’a pas défini la notion de conducteur, la jurisprudence a progressivement été amenée à apporter des précisions.
Cas de jurispridence
- Ainsi, la Cour de cassation a reconnu la qualité de conducteur à une personne se trouvant pratiquement à l'arrêt sur son cyclomoteur non éclairé au milieu de la chaussée et qui essayait de le faire démarrer (cass civ 28 avril 1986 n°85-11.175).
Il importe donc peu que le véhicule soit ou non en mouvement.
- La Cour de cassation a également jugé qu’avait conservé la qualité de conducteur la victime qui se trouvait au volant de son véhicule, à l'arrêt sur une piste cyclable de nuit, feux éteints et qui avait ouvert la portière de son véhicule.
La Cour de cassation a considéré que la victime avait conservé la maitrise de son véhicule et qu’elle n’avait donc pas perdu la qualité de conducteur (cass civ 18 février 2010 n° 09-12.250)
Mais si le conducteur n’est plus aux commandes, a-t-il perdu pour autant la qualité de conducteur ?
Les juridictions ont parfois été saisies de situations complexes dans lesquelles la frontière entre le conducteur et le non-conducteur n’apparait pas évidente.
- Dans une affaire ayant donné lieu à un arrêt rendu le 28 mars 2013, la Cour de cassation a reconnu la qualité de conducteur à… un adolescent de 13 ans !Un adolescent avait pris place dans le véhicule de sa sœur et il avait fortuitement démarré le véhicule en voulant allumer l'autoradio. Le véhicule avait alors effectué un « bon en avant » et la sœur de l’adolescent avait été blessée.
L'adolescent pouvait-il être considéré comme un conducteur au sens de la loi Badinter ?
Les juges du fond avaient répondu par la négative aux motifs que l’adolescent n’avait pas eu l’intention de déplacer le véhicule et qu’il n’avait pas acquis la qualité de conducteur étant « passager d'une voiture à l'arrêt qui actionne la clé de contact pour mettre en marche l'autoradio ».
La Cour de cassation a censuré les juges du fond aux motifs qu’ils avaient ajouté une condition à la loi exigeant la preuve d'une intention de déplacer le véhicule. Pour la Cour de cassation, le fait que l’adolescent ait actionné le démarreur et mis le véhicule en mouvement suffisait à lui conférer la qualité de conducteur (cass civ 2ème 28 mars 2013 n°12-17.548).
